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vive les sociétés modernes - abécédaire
17 octobre 2011

R comme Rencontre (et réseaux)

La naissance ressemble à une entrée en scène, chaque être peut en perspective bouleverser l'ordre établi mais dès le départ, le nouveau né est marqué du sceau des ses origines: son pays, sa famille, son corps, son esprit. Ces limites ne sont pas infranchissables, elles n’existent que pour qui s’y enferme. Rien n'empêchera un être marqué par sa souche, d’irradier par son esprit bien au-delà des frontières natives. Le ferment essentiel de cette métamorphose est le plus souvent la rencontre, une forme de complémentarité, comme une attente exaucée. Les moyens modernes de la communication ont fait éclater toutes les limites physiques (avions, téléphone, Internet..), idéologiques (écriture, journaux, cinéma, TV ...) ou créatrices (expositions, réseaux sociaux, marchés...).

La rencontre semble le ferment de l’accomplissement de chacun. Que d’œuvres sont nées du jaillissement que l'amour engendre. Mais l'amour n'est pas la source essentielle, il n'est qu'un des acteurs. Il a des partenaires: la haine, l'envie, la violence ; il a des ennemis: le temps, le mensonge, l'orgueil (que de chefs-d'œuvre sont nés de la frustration !). Il y a surtout les muses: l’esprit, la beauté, la jeunesse...Pour la rencontre, il faut accepter que ce que l'on nomme le « hasard des rencontres » n’a de limite que notre énergie. Il n'y a pas de “hasard” dans la rencontre. Il y a ce que l'on est, le lieu où l'on vit, l'attente qui sommeille en chacun mais il y a surtout l'énergie, le mouvement, en un mot: la liberté. Internet et les millions de connections engendrées par les technologies modernes permettent de connaitre en temps réel les nouvelles du monde, de la famille, des amis et de ceux dont les valeurs coïncident avec celles que l’on recherche, de se connecter à différents réseaux et de faire des rencontres inimaginables en d’autres temps.

En se retournant sur sa propre vie, chacun peut retrouver deux ou trois charnières essentielles qui ont orienté son destin. Pas toujours une personne, parfois un livre, ou une fonction inattendue ouvrant sur des perspectives.  Les potentialités de rencontre sont quasi infinies pour qui le souhaite. L’inconnue reste toujours la suite de l’histoire. Est-ce un destin ?

A ceux qui ne croient pas au destin, à la voie tracée qu'il faut reconnaître, aux rencontres, je dirai simplement : dommage ! L'histoire qui n'est en fait qu'une lecture rétrograde de la vie qui s'écoule, fourmille d'illustrations troublantes. Si la liberté est une pièce maîtresse pour orienter les choix et faire d'une vie un destin, elle n'a pas tous les pouvoirs. Il y a des éléments qui sont propres à chacun, qui font le tissu de chaque être et qui en fin de compte ne donnent pas au Prince les mêmes chances qu'au malheureux des bidonvilles. Entre ces deux, toutes les nuances de la vie humaine. Je n'aime pas le mot "chance", il a une connotation passive. A la limite, compte tenu de notre organisation sociale, la naissance en est la première manifestation. Ici ou là, riche ou pauvre, beau ou laid, orphelin ou attendu, que de trajectoires diffèrent dès la première apparition. On ne rencontre pas toujours ce que l’on attend, mais il faut bouger pour le savoir.

 

Freddy Chiche

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Commentaires
V
Je réponds à la question précédente. Plutôt de ses lectures ou son appartenance chrétienne en général...Ce n'est pas un auteur particulier qui a dit cela. Il y a toute une tradition chrétienne qui se cache derrière cette formulation mais qu'on peut aussi utiliser de façon tout à fait...laïque. Ne parle-t-on pas d'un "moment de pur grâce"? ou d'être "touché par la grâce"? On voit là, la marque de la gratuité, du don reçu (par Dieu)sans mérite particulier de notre part.
J
Le nom que j'ai donné en titre à mon commentaire est connu de (presque...) tous à Orléans puisque c'est dans cette ville qu'un destin peu commun et parfois douloureux l'avait finalement amené à enseigner et résider. Je pense à lui parce qu'il fut un infatigable initiateur de rencontres, un organisateur de discussions passionnées, un distributeur de paroles, de lectures et d'écrits.<br /> Grâce à lui et à Henriette, qui partageait ses choix et ses engagements et cuisinait merveilleusement, la salle à manger des Reggui était le lieu de la plus grande convivialité qui soit. Le réseau des amitiés et des relations de Marcel Reggui s'étendait jusque dans les coins les plus reculés du monde. Sans avoir jamais touché un ordinateur, il avait en mémoire la date de naissance et celle de la fête patronale de tous ses nombreux amis et leur adressait régulièrement quelques vers d'Aragon, quelques fragments de Mounier. C'est à un bureau de poste ou à une boîte aux lettres, plus qu'à une salle de conférences, que l'on aurait dû donner son nom.<br /> J'ai eu le bonheur de rencontrer cet homme qui a voué son énergie à faire se rencontrer des gens qui pouvaient d'abord se sentir différents les uns des autres. Et je l'entends encore dire que "toute rencontre est une grâce". <br /> Mais voilà que je ne sais pas, que je ne sais plus d'où il pouvait avoir tiré cette formule. De Saint Augustin ou de Jean Amrouche, Algériens comme lui? De ses maîtres ou de ses lectures chrétiennes? <br /> Si quelqu'un peut me répondre ou me mettre sur la voie, je l'en remercie!
Y
La plus petite possible, le plus vite possible. Car, dans le bilan d'une vie, la somme de tout ce qui l'a déterminée, encadrée, assujettie, est potentiellement affligeante. Potentiellement, car, heureusement, toutes les victimes d'un destin trop pesant, d'une voie trop bien tracée, ne s'en aperçoivent pas.<br /> Les sociétés modernes ont elles une supériorité sur les autres, sur cette part laissée au destin? Indiscutablement, y compris par cet interventionnisme en faveur de ceux qui semblent piégés par leurs conditions de départ, ce dont JCH semble douter. Son rendement est faible, car les chances offertes doivent être saisies, c'est vrai.<br /> Les sociétés ne peuvent pas tout faire, d'autant qu'elles ont tendance à se figer dans un équilibre minimum. Elles ne peuvent évoluer que par la volonté positive ou négative d'individualités, qui les entrainent, ou qui se révoltent contre leur inertie.<br /> Nous avons tous un destin, fait du désir des parents, des cartes génétiques distribuées, sexe compris, des contraintes culturelles pré-existantes. Nous trouvons notre épanouissement à proportion de notre éloignement.
V
Quel beau texte, traversé d'une belle énergie, de beauté et de poésie! Cela nous sort un peu de l'économie ou du politique des billets précédents..même si on pourrait faire une lecture de ses derniers sous le signe de la rencontre...heureuse ou malheureuse! <br /> Oui, les rencontres, amoureuses, amicales, professionnelles, sont ce qu'il y a de plus merveilleux dans la vie, signes d'un "destin" qui nous échappe et que nous avons le plus souvent crée nous-mêmes (Jung parlait de synchronicité...Freud s'en moquait et parlait de névrose de destinée...passons);signes aussi de la beauté des imprévus pleins de mystère dont nous reconstituons l'histoire et dont nous trouvons le fil directeur qu'après coup...Il y des rencontres heureuses ou malheureuses mais elles arrivent toutes au moment où on est prêts à les accueillir ou à les affronter. Je suis consciente que ce que je dis pourrait soulever des objections... Mais pour moi, elles sont toutes positives et nécessaires. Je parle des adultes surtout, le cas des enfants est plus complexe. Et pour une fois, je reste volontairement mystérieuse, plus poétique, moins universitaire...pour reprendre un peu la discussion précédente avec Yves. A chacun de donner le sens qu'il désire à ces propos.
J
Merci à Freddy Chiche de rappeler que les déterminations natives ne sont pas des horizons indépassables. Merci aussi pour cette allusion au conte de Mark Twain (Le Prince et le pauvre) que j’ai cru percevoir dans le troisième paragraphe. Je partage aussi cette réticence devant un certain usage du mot chance (inégalité des chances, école de la deuxième chance…) qui laisse croire que tout est potentiellement possible (si j’ose dire !) et qu’en fin de compte on ne doit s’en prendre qu’à soi-même si on ne l’a pas saisie ou si on ne l’a pas vue passer.<br /> Mais je me demande si la multiplication et la diversification des réseaux et des moyens modernes de communication n’est pas un leurre. Les modalités de la rencontre (de l’autre, de la perspective nouvelle, de l’œuvre décisive…) sont évidemment démultipliées, les carcans se sont assouplis, le champ des possibles s’est étendu mais le jeu des codes sociaux et des clefs initiales à posséder n’est pas aboli. La modernité fait miroiter le virtuel, mais comme le Prince, le mendiant et F Chiche… chacun de nous n’a qu’une vie !
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  • Cet abécédaire est élaboré progressivement. Les contributions proviennent d'horizons (professionnels, disciplinaires, philosophiques...) divers. Il voudrait être un témoignage sur notre époque.
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