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vive les sociétés modernes - abécédaire
14 janvier 2015

X comme Xénophobie ou intégration (le choix des sociétés modernes)*

 

Le mot xénophobie désigne l’hostilité aux « étrangers », du seul fait qu’ils ne sont pas comme nous. Cette répulsion est une forme agressive et pathologique du nationalisme, qui consiste à ressentir que l’autre, par son identité différente, constitue une contestation ou même une menace pour notre identité. Car cette hostilité repose moins sur un sentiment de supériorité, ou sur une menace réelle de la part des autres, que sur la crainte de voir « notre » identité mise en question par l’existence de la leur.

Poussant à l’extrême cette crise identitaire, la xénophobie nazie a conduit dans les temps modernes à commettre des « crimes contre l’humanité » : certains « autres » ont été exclus de l’humanité et exterminés en tant que virus menaçant le moi du peuple allemand.

La croyance en l’existence de races différentes- aussi discutable que soit cette classification -  relève plus du racialisme que du racisme tel que ce terme est entendu. Le racisme est en effet  entendu comme xénophobe en ce qu’il considère que toutes les autres races sont inférieures en humanité.

À l’opposé de la xénophobie, l’appartenance de tous les humains à la même espèce est déjà inscrite dans le principe du monothéisme, selon lequel Dieu fit l’homme à son image... Les sociétés modernes, en raison de leur héritage religieux, philosophique et culturel, se réclament de l’unité du genre humain, et particulièrement de la raison qui est universelle.

La xénophobie est donc implicitement réprouvée par la charte des nations civilisées (la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948) qui postule que tous les êtres humains sont égaux e

En réaction au nazisme, les morales des sociétés modernes, dites aussi « sociétés ouvertes », prônent souvent des valeurs xénophiles, telles l’hospitalité, la curiosité, l’intérêt pour les cultures différentes et égales, les échanges, les mélanges et finalement même le métissage.

Le film Qu’est-ce qu’on a fait au bon dieu ? est une illustration humoristique des réticences au métissage, réticences dépassées qui finissent par sauter devant les effets de la mondialisation et de l’immigration.

Si la xénophobie appartient indiscutablement aux mauvais sentiments, aux mauvaises passions, sans oublier qu’elle est ridicule, la xénophilie systématique de son côté relève des bons sentiments, ce qui n’est pas forcément un compliment. On n’est pas un salaud ou un raciste parce qu’on avoue ne pas apprécier certains traits de culture et de comportement chez certains « autres » que nous. Il n’y a pas de honte à penser et à dire que tout ce qui est différent n’est pas forcément estimable et aimable. Il n’est même pas honteux de préférer et de vouloir protéger sa culture, sa manière de vivre.

Finalement, « le rapport aux étrangers » est redevenu une question ouverte – et clivante - pour les peuples des sociétés modernes confrontés à l’immigration et à la mondialisation.

En Europe, des partis « identitaires » croissent en influence. « La préférence nationale » fait l’objet de débats de plus en plus intenses.

Si la haine de l’étranger est absolument contraire aux fondements des sociétés modernes, il serait faux, et contre-productif, de traiter de néo-nazis ou de racistes ceux qui ne pensent pas que c’est à eux de s’adapter aux autres.

Les sociétés modernes doivent impérativement être « ouvertes » aux autres, et s’enrichir des différences étrangères, dans la mesure où celles-ci sont positives et sont compatibles avec leur moi (ou leur soi)  ; elles ont le droit de chercher à préserver leur « moi identitaire» au long de ces échanges, comme le fait tout organisme vivant qui tend par nature à « persévérer dans son être » comme disait Spinoza.

À la différence de l’assimilation, l’intégration ne suppose pas l’effacement des différences. L’objectif de l’intégration (des autres à soi) est le meilleur rempart contre la xénophobie.

 

Ne traitons donc en ennemis ni les « étrangers » qui ne le méritent pas, ni ceux des « nôtres » qui veulent conserver leur mode de vie.

Philanthropie bien ordonnée commence par soi-même. 

 

André Senik

 

* texte écrit par A.Senik avant les attentats de ce début de 2015. Le blog continue d'autant que nous faisons nôtre le symbole des crayons brandis.

 

 

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Commentaires
J
Je vais reprendre tout cela au début...<br /> <br /> Oui, au début du mot, tel qu'on le prononce ou devrait le prononcer!<br /> <br /> Le Robert ne laisse aucun doute: difficile ici d'utiliser l'A.P.I. mais il faut dire que l'on est (ou pas) [ksé...] et non pas [gzé...]. De même, on joue du "ksi...lophone", pas du "gzi...". mais si on a sur la peau une petite tache jaunâtre, c'est peut-être un xanthome (un "gzanthome"... pas un "ksanthome"). Héritage de la prononciation grecque des origines? Je ne sais... En tout cas, si vous consommez du vin de Jerez, bref du Xérès, Robert vous permet de suivre l'usage courant ("gz...") ou celui de l'Académie ( un kerès.. comme on dirait un kir) ou même de prononcer comme... xénophobe!<br /> <br /> Bref, moi qui dis, j'en suis conscient, "gzénophobe", je suis dans l'erreur. Et le pire c'est que je m'en doutais un peu!<br /> <br /> Mais j'ignorais que le mot grec "xenos" signifiait d'abord "hôte"... et qu'il désignait ainsi, comme les mots "hôte" et "guest", aussi bien celui qui reçoit que celui qui est reçu. Comme celui qu'on reçoit, qui apporte des cadeaux et à qui l'on en offre, n'est, justement, pas de chez nous (sinon... on ne le "recevrait" pas, pardi!), c'est qu'il est d'ailleurs: il est donc "étranger"!<br /> <br /> On est ainsi, d'emblée, dans les mots, au coeur d'une question d'hospitalité, d'accueil et d'usages et non dans le registre de la différence d'aspect, de langage etc... A tel point que je ne sais plus trop si le xénophobe est celui qui clame "moi, j'aime pas les étrangers..." ou celui qui déclare qu'il n'aime pas accueillir, et peut-être même pas être accueilli!<br /> <br /> En, tout cas, la xénophobie, c'est mal vu! Il me semble avoir entendu des gens se glorifier d'être raciste, ou antisémite (il existait autrefois, dans le Loiret un journal qui se décernait à lui-même cet épithète... qui caractérisait son programme et ses objectifs!). Personne, à mon avis ne se proclame "xénophobe et fier de l'être". Parce que le mot est trop savant? Pas si sûr... J'avance une hypothèse, liée à la valeur symétrique du mot: on sait bien qu'il suffit de bien peu pour devenir "étranger" (il suffit de passer une frontière) ou pour cesser de l'être (regagner son pays ou être admis et reconnu, naturalisé...); alors qu'on sait bien que la qualité de "noir", de "blanc" de "juif" etc... ne se perd ou ne s'acquiert pas comme ça!<br /> <br /> Cela dit, ceux qui cultivent la détestation de l'étranger ne sont pas exclusivement xénophobes: d'ailleurs quand ils disent "les étrangers", on comprend bien qu'ils visent, au-delà des "simples" étrangers dont la nationalité est différente, ceux dont l'étrangeté est visible, les métèques et autres rastaquouères... Et j'emploie à dessin des mots usés, datés parce que je ne parviens pas à reprendre les mots péjoratifs méprisants ou orduriers qui courent les rues et l'internet.<br /> <br /> D'ailleurs, certains peinent quand les catégories se fondent et qu'ils doivent se confronter à l'idée qu'on peut être "noir et français", "arabe et chrétien", et même "flic et arabe" voire "bosniaque et musulman de père.. croate et catholique de mère... et suédois de naissance et de nationalité comme Zlatan Ibrahimovic", qui joue au PSG, le club le plus qatari de France!<br /> <br /> Sénik, qui déteste sans doute la xénophobie, estime qu'il faut aussi se défier des bons sentiments et de la xénophilie. S'il s'agit de réaffirmer le droit de ne pas se contraindre à trouver bon tout ce qui vient d'ailleurs, il a bien raison. S'il dénonce l'erreur qui reviendrait à taxer de nazisme ou de racisme tout attachement raisonné à des usages dont on a hérité et dont on se trouve bien, il a raison.<br /> <br /> Mais il me semble que c'est aujourd'hui du côté, des discours qui attisent la haine de l'autre, du côté de la xénophobie ordinaire ou exacerbée et partagée par de gens qui parfois se haïssent tant les uns les autres que se situe le danger principal pour les sociétés modernes comme pour tant d'autres qui ne le sont pas, ne le peuvent le devenir ou ne le souhaitent même pas. <br /> <br /> Les exécutions à Charlie, au supermarché casher ou dans la rue nous ont à juste titre bouleversés... Je trouve que nous nous accommodons finalement assez bien de notre inaction et de notre impuissance par rapport aux exactions barbares qui ont cours au coeur de l'Afrique où la xénophobie se porte assez bien, aux abords du Lac Tchad où Boko Haram déchaîne la barbarie.
M
Le terme de "Préférence Nationale" fait partie du vocabulaire du Front National et, à ce titre, est très connoté politiquement.<br /> <br /> Cela dit, à notre connaissance, .aucun pays n'a abandonné toute discrimination vis à vis des étrangers.<br /> <br /> Même dans la Communauté Européenne, dans l'espace Schengen, malgré les règles autorisant la libre circulation des personnes et de nombreuses reconnaissances mutuelles, la Cour de Justice Européenne a donné raison aux Etats-membres qui ont strictement encadré le droit aux prestations sociales pour les ressortissants d'autres pays communautaires (notamment enfin de lutter contre le "tourisme social" ).
Y
Je brûle de savoir quels sont les pays qui ont fait cette faveur aux non-nationaux, forcément avec le consentement de leurs citoyens. Car il ne peut s'agir que de démocraties très évoluées, et prospères.
P
Comme M&J j'ai tendance à penser que la xénophobie (dans tous les sens du terme) est l'une des choses du monde les mieux partagées. C'est pourquoi on ne devrait pas sous-estimer le degré de civilisation des quelques, et rares, pays qui ont décidé de rejeter le principe de la "préférence nationale" et donc d'attribuer les mêmes droits professionnels et sociaux à leurs nationaux et aux étrangers. Combien sont ces pays parmi les 197 (?) États du monde? Je me demande même si dans la grande majorité des pays du monde l'idée qu'il ne faille pas faire de différence (dans l'accès aux métiers, au logement...) entre natifs et étrangers n'apparaîtrait pas comme totalement inintelligible.
M
La présentation d'André Senik est claire et bien structurée, mais peut-être un peu trop schématique.<br /> <br /> Est-il si aisé de définir et de distinguer " l'Etranger"?<br /> <br /> On peut l'être dans son propre pays ,comme l'a montré Camus. Et sans chercher un exemple aussi extrême, il suffit de constater l'étonnement et parfois la méfiance réciproque du citadin touriste et du campagnard qui le voit passer.<br /> <br /> N'y-a-t-il pas aussi , dans les sociétés modernes, un fossé intergénérationnel, et, dans ce cas, lorsque l'incompréhension croît, lequel est "l'autre" qui doit chercher à s'adapter? Pour les anciens, il faut essayer de comprendre et s'intégrer dans cette nouvelle civilisation du numérique que leurs enfants ont développée et où leurs petits-enfants sont parfaitement à l'aise. Pourtant ils se sentent les gardiens de la tradition et de valeurs humanistes qui s'estompent peu à peu.<br /> <br /> Mais revenons à une définition plus classique de l'étranger, celui qui ne parle pas notre langue (que les grecs appelaient barbares).<br /> <br /> La France est un pays libéral et laïque. Dans l'Union Européenne, c'est aussi, dans cette époque troublée, un des Etats-Membres qui accueille proportionnellement le moins d'immigrés. Les Français, à Bruxelles et Strasbourg, aiment bien faire la leçon<br /> <br /> aux autres et voter des lois contraignantes . Mais la France est aussi au nombre des Etats-Membres les plus réticents à s'imposer les contraintes communautaires à l'élaboration desquelles elle a participé, ce qui l'a faite condamner plusieurs fois par la Cour de Justice Européenne.<br /> <br /> Certes, nous sommes sûrs que notre façon de vivre est bonne (si ce n'est la meilleure!), mais, dans l'Union Européenne, est-ce forcément aux autres à appliquer notre mode de vie?<br /> <br /> Qui est "l'autre", celui dont le devoir est de s'adapter , de s'intégrer, de s'assimiler ?<br /> <br /> Quand on s'installe à la campagne, il faut accepter la vie rurale, les chants des coqs et les sonneries des cloches. La réponse est facile, mais est-ce toujours le cas? En France, les métropolitains acceptent sans état d'âme l'écart du niveau de vie entre la métropole et les territoires d'outre-mer. Pourtant, il n'existe que des citoyens égaux en droit : en l'absence de toute xénophobie, on ne voit pas pourquoi ils ne devraient pas tous bénéficier des mêmes privilèges.<br /> <br /> Et qu'en est-il de la coexistence entre l'arabe palestinien et le colon israélien ?
vive les sociétés modernes - abécédaire
  • Cet abécédaire est élaboré progressivement. Les contributions proviennent d'horizons (professionnels, disciplinaires, philosophiques...) divers. Il voudrait être un témoignage sur notre époque.
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