P comme Plantes transgéniques (1. La sélection classique)
Les organismes vivants sont en perpétuelle évolution. Ce fait n’a probablement été perçu par les communautés humaines qu’avec l’invention de l’agriculture et de l’élevage. La maitrise de la reproduction a permis la sélection qui nous a procuré la quasi-totalité de nos produits alimentaires, de nos animaux de compagnie et de nos plantes ornementales. Ces activités très empiriques reposent sur des modifications génétiques spontanées aussi considérables parfois qu’inconnues. Un certain nombre de plantes et d’animaux domestiqués sont tellement modifiés qu’ils ne ressemblent plus tellement à leurs ancêtres. Les carottes comme les vers à soie sont ainsi devenus incapables de se reproduire sans l’assistance de l’homme et certaines espèces domestiquées ne se croisent plus avec leurs homologues sauvages. La sélection classique repose sur les croisements entre les parents les plus performants pour obtenir une amélioration des variétés et des races. Les descendants qui n’ont pas les caractéristiques attendues sont consommés ou éliminés sans se reproduire.
Cette approche qui a fait et fait encore preuve de son efficacité a aussi ses limites. Un exemple éloquent est celui de variétés de pommes de terre qui ont empoisonné des consommateurs. On sait maintenant que la sélection faite pour améliorer les pommes de terre en question s’est, a l’insu des sélectionneurs, accompagnée d’une sélection de gènes responsables de l’augmentation de la synthèse de toxines naturelles jusqu’alors inconnues. Beaucoup de plantes contiennent des toxines propres à dissuader les prédateurs de les consommer. Ce genre d’incident peut donc se reproduire avec d’autres espèces. Une autre limite est le faible taux de mutants naturels qui apparaissent au fil des générations. Pour diversifier leurs choix, les sélectionneurs procèdent à des mutations à l’aide de composés chimiques et d’irradiation mutagènes. Les mutations sont alors multiples et se font au hasard. Le tri élimine les nombreux individus peu productifs ou trop dénaturés par les mutations. Ce procédé, curieusement parfois présenté comme une alternative aux OGM, est relativement efficace mais brutal et mis en œuvre en aveugle. Il a permis d’homologuer plus de 2500 variétés de plantes très mal connues et qui se retrouvent dans nos assiettes. Il est par ailleurs possible de croiser des variétés de plantes ou d’animaux soigneusement choisis pour donner naissance à des individus hybrides plus productifs. Plus impressionnants sont les mulets qui résultent d’un transfert en aveugle des 25000 gènes du cheval dans l’âne ou l’inverse. Les sélectionneurs ont même créé de novo deux nouvelles espèces de plantes. L’une est le triticale résultant du croisement forcé entre le blé et le seigle. Cette espèce est abondamment cultivée depuis des décennies pour l’alimentation animale sans autre forme de procès. (à suivre)
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Louis-Marie Houdebine
Chargé de mission INRA
Biologie du Développement et Reproduction
Institut National de le Recherche Agronomique
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