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vive les sociétés modernes - abécédaire
5 mai 2010

P comme Principe de Précaution

 

pour la gestion durable

de sols soumis à la pression urbaine

 

Le principe de précaution est né en Allemagne dans les années 1970, pour développer une « gestion soigneuse des ressources naturelles " (1). De nombreux biens communs à l'Humanité sont des ressources naturelles renouvelables rapidement, donc exploitables sans trop de conséquences néfastes, si un minimum de précautions est pris. D'autres, comme les sols, sont moins des ressources que des patrimoines stables ou à évolution très lente, qui réclament une grande responsabilité des pouvoirs publics et des citoyens. La principale cause d'érosion des sols agricoles en France est l'urbanisation.

D'excellents sols agricoles ont été convertis en terrains à bâtir, du fait de la non-prise en compte de la nature des sols dans la planification de l’urbanisation et de l’aménagement du Territoire autour de Paris. Ces sols agricoles, parmi les meilleurs du monde, ont été utilisés pour des aérodromes et des zones industrielles ou commerciales éphémères au gré d'investissements délocalisables. Or ces sols ont évolué durant 10000 à 12000 ans pour parvenir aujourd'hui à leurs fortes potentialités agricoles. Même s’ils appartiennent à des propriétaires individuels, ils constituent un capital agricole national, voire européen et même mondial. Ils devraient, à ce titre, être réservés à la nourriture des Hommes, au nom d’un principe de précaution, qui primerait sur le sacro-saint « droit de propriété ». Ce droit en effet n'a de sens que si le propriétaire gère ce bien en « bon père de famille » responsable et ne succombe pas aux prix alléchants offerts par des promoteurs immobiliers, inconscients de la rareté de tels sols à l'échelle nationale. Une « planification  européenne», en cas de déni français, devrait être mise en place pour cartographier les sols qui pourraient convenir à l'urbanisation et préserver ceux qui constituent un capital majeur pour l'agriculture. Il y a trente ans, à la demande de la direction départementale de l'Agriculture de l'Oise, ce travail (2) a été fait sous forme d'une carte des sols et d'une carte des potentialités agricoles des sols en vue de leur protection contre l'expansion parisienne. Malheureusement cet exemple n'a pas été poursuivi ailleurs, plus près de la capitale.

Cet exemple des sols massacrés par ignorance ou par mépris permet au pédologue d'illustrer le principe de précaution, qui couvre bien des aspects à pondérer. A la suite de François Ewald (3), je le définirai comme une « norme » du développement durable, établie progressivement « par des Etats rassemblés au sein de l'ONU » en vue de la « gestion des ressources et la protection de la planète ». Une « affaire d'Etats » qui la « mettent en oeuvre », « sanctionnée que par des juridictions administratives » saisies soit par un citoyen lésé, soit par « un citoyen ou un groupe de citoyens reprochant à l'Etat une autorisation » ne tenant pas compte du principe de précaution (OGM (4) pesticides par exemple), soit par un (des) Etat(s) en contentieux.

Loin de n'être qu'« un principe de réduction de risque », il induit « des mesures de prévention même si il n'y a pas de certitude sur le rapport de causalité », quand « la menace est incertaine et mal documentée »... « Le principe de précaution interdit de reporter la décision au motif d'une incertitude scientifique... et proscrit l'irrésolution».

 

La définition du Principe de Précaution varie d'un Etat à l'autre. Les Allemands ont une « vision large » qui distingue « danger connu » et « risque potentiel ». Les Anglais sont réticents à donner trop de place à l'incertitude : la mise en oeuvre repose sur « la présomption de risques significatifs » et « sur une évaluation du rapport coût-avantage ». La France s'est contentée « d'inscrire le principe dans son droit », mais aucun texte gouvernemental ne donne de vision française du principe de précaution !

 

Dans les textes, principalement la Déclaration de Rio sur l'environnement et le développement, le principe de précaution est associé au principe pollueur-payeur. Dans les conventions, « une multitude de dispositions précise la mise en oeuvre au cas par cas » du principe de précaution. C'est là qu'il faut encore « chercher la signification de ce principe » jeune et ouvert à tous les aspects philosophiques, éthiques, économiques, soulevés par les découvertes scientifiques et les innovations technologiques.

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Michel Isambert (pédologue cartographe)

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1 Le principe de précaution François Ewald et Coll PUF Que sais-je ? Nov 2008

 

 

2 Les sols du département de l'Oise INRA-SESCPF JC Bégon et Coll. 1976

 

 

3 ibidem

 

 

4 Organismes génétiquement Modifiés

 

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Commentaires
M
"Mieux vaut prévenir que guérir"<br /> D'ailleurs tous les techniciens sacrifiés, les gens japonais, chinois, américains, européens, océaniens, ... contaminés par l'air, l'eau, la nourriture guériront-ils des cancers, leucémies... ?<br /> Certes, c'est facile "a posteriori".<br /> Mais là, on n'a vraiment cherché la catastrophe, au lieu d'appliquer ce fameux "principe de précaution".<br /> "Elémentaire, mon cher W..."<br /> <br /> Mais si tous les nucléocrates envoyaient cette pétition, en reconnaissant leur aveuglement, <br /> Dieu aurait encore "écrit droit avec des lignes coubes", en les (nous ?) ramenant tous à plus de raison.<br /> <br /> Pétition cyber@acteur à envoyer à l'ambassadeur du Japon au mail suivant<br /> <br /> <br /> info-fr@ps.mofa.go.jp<br /> <br /> <br /> <br /> Transparence des informations et aide aux sinistrés de Fukushima.<br /> <br /> <br /> Monsieur l'ambassadeur,<br /> <br /> <br /> Par la présente j'ai l'honneur de demander<br /> <br /> <br /> 1. la publication immédiate d'un décret d'extension du périmètre de la zone d'exclusion et évacuation de la zone. <br /> <br /> 2. l'évaluation et la publication régulière des doses de radiation auxquelles les populations civiles sont exposées. <br /> <br /> 3. l'abrogation de la modification du relèvement de la dose maximale admise de radiations (250 milliSieverts) pour les ouvriers urgentistes de la centrale de Fukushima. <br /> <br /> 4. l'élargissement du spectre des relevés de radiation et la publication des résultats. <br /> <br /> 5. le lancement immédiat d'une étude approfondie sur l'exposition aux radiations et sur l'état sanitaire des populations touchées ainsi que la prise en charge à long terme de ces effets. <br /> <br /> 6. le non-assouplissement des normes de prévention au regard des niveaux maximum de radio-nucléides pouvant être relevés dans la nourriture.<br /> <br /> 7. l'assurance des dédommagements aux filières agricoles et laitières ainsi qu'aux populations déplacées. <br /> <br /> 8. De manière générale, la prise de toutes les mesures nécessaires pour garantir aux citoyens de ne pas être exposés à des doses de radiations supérieures à 1 milliSievert / an.<br /> <br /> <br /> Veuillez agréer, Monsieur l'ambassadeur, l'assurance de ma solidarité avec les populations de votre pays victimes de cette catastrophe tout à fait prévisible. Mais le « principe de précaution » n'a pas été appliqué ... pas plus qu'en France, d'ailleurs.
M
OGM : le Gers dépose un recours contre Bruxelles<br /> LE MONDE | 20.09.10 | 14h13 • Mis à jour le 21.09.10 | 09h19<br /> Bruxelles Envoyé spécial<br /> <br /> Le conseil général du Gers s'apprête à déposer, d'ici au 30 septembre,<br /> un recours contre la Commission européenne auprès de la Cour de justice<br /> de l'Union européenne (CJUE), à Luxembourg. La procédure vise les<br /> décisions prises par la Commission, le 28 juillet, d'autoriser<br /> l'importation pour la consommation de cinq variétés de maïs<br /> transgénique et de renouveler l'autorisation d'une sixième. Philippe<br /> Martin, président (PS) du conseil général, a annoncé cette procédure,<br /> originale de la part d'une collectivité locale, lors de la conférence<br /> "Europe sans OGM 2010", qui s'est tenue dans les locaux du Parlement<br /> européen, à Bruxelles, le 16 septembre.<br /> <br /> "Ce qui me choque dans cette décision (de la Commission), c'est que les<br /> Etats sont spectateurs et le Parlement exclu, et que la Commission ne<br /> se fonde que sur une expertise, a déclaré le député du Gers. On ne peut<br /> pas prendre une telle décision, au coeur de l'été, dans de telles<br /> conditions. Notre recours est un combat pour la démocratie et pour la<br /> gouvernance européenne."<br /> <br /> Le président du conseil général du Gers a été enhardi par une décision<br /> du Conseil d'Etat, en date du 30 décembre 2009, qui a reconnu la<br /> validité d'une délibération de son assemblée, par laquelle celle-ci<br /> s'était opposée, le 11 juin 2004, à la culture des organismes<br /> génétiquement modifiés (OGM) sur son territoire. La juridiction<br /> administrative française a reconnu que, compte tenu de l'importance de<br /> l'activité agricole dans le département, la question des OGM était bien<br /> d'intérêt départemental.<br /> <br /> Selon Dominique Rousseau, professeur de droit public à l'université<br /> Paris-I, qui a développé l'argumentation qui sera présentée devant la<br /> Cour européenne, la plainte est bien recevable : "Le département est<br /> directement concerné parce qu'il a une activité agricole spécifique,<br /> notamment biologique, menacée par les OGM." Par ailleurs, les décisions<br /> du 28 juillet ne seraient pas régulières, du fait qu'elles ne se<br /> fondent que sur une évaluation scientifique : "La CJUE rappelle<br /> régulièrement que la Commission doit exercer ses compétences sans être<br /> liée par l'expertise", dit le juriste. Enfin, le recours du département<br /> du Gers conteste la régularité du règlement n° 1829-2003 sur lequel se<br /> fondent les décisions.<br /> <br /> M. Martin espère que d'autres collectivités locales européennes<br /> emboîteront le pas à son département. Le ministre de l'agriculture de<br /> la région belge de Wallonie, Benoît Lutgen, a indiqué que sa région<br /> pourrait se joindre à la procédure. Celle-ci n'est pas isolée : en mai,<br /> la Hongrie a attaqué la décision de la Commission, au mois de mars,<br /> d'autoriser la pomme de terre transgénique Amflora, développée par la<br /> firme BASF. Début septembre, l'Autriche a notifié à la CJUE qu'elle se<br /> joignait à la plainte hongroise, et le Luxembourg a fait de même le 15<br /> septembre. Un épisode de contamination d'une culture de cet OGM par une<br /> autre pomme de terre transgénique, non autorisée celle-là, révélé en<br /> Suède le 4 septembre, a sans doute encouragé cette démarche.<br /> <br /> "Nous attaquons la décision de la Commission pour trois raisons,<br /> explique Katalin Rodics, qui représentait le ministère hongrois du<br /> développement rural à la conférence de Bruxelles. Elle ne respecte pas<br /> le principe de précaution, une évaluation correcte de l'OGM n'a pas été<br /> menée, et il n'y a pas eu d'investigation sur ses effets à long terme."<br /> <br /> Le commissaire européen à la santé et à la protection des<br /> consommateurs, John Dalli, en charge du dossier des OGM, n'a pas réagi<br /> à ces différentes procédures. Lors de la conférence, il a insisté sur<br /> la nécessité de "fournir un choix aux consommateurs entre les produits<br /> OGM et les non-OGM". Il a plaidé pour la proposition faite par la<br /> Commission, en juillet, de laisser les Etats européens décider<br /> eux-mêmes de l'autorisation de cultiver les plantes transgéniques sur<br /> leur territoire, tandis que les autorisations d'importation<br /> reviendraient à la Commission. "Il faut un débat concret, pas<br /> rhétorique, a-t-il dit. C'est seulement comme cela qu'on aura une<br /> solution acceptable pour tout le monde."<br /> <br /> En réponse, le député européen José Bové (Europe Ecologie) a rejeté la<br /> proposition de s'en remettre aux Etats : celle-ci entraînerait<br /> forcément, selon lui, une contamination des cultures non transgéniques<br /> par les cultures voisines OGM. De plus, selon M. Bové, ce système<br /> provoquerait une distorsion de concurrence entre les agriculteurs<br /> "biologiques" des pays libres d'OGM et ceux des pays où les OGM<br /> seraient cultivés. Selon M. Bové, il n'est pas possible de changer la<br /> réglementation européenne tant que la demande du conseil des ministres<br /> de l'environnement, exprimée en décembre 2008, de refondre les<br /> procédures d'évaluation de l'Autorité européenne de sécurité<br /> alimentaire (AESA) n'a pas été satisfaite. M. Dalli a indiqué que cette<br /> refonte était engagée et a invité les députés européens à participer à<br /> cette démarche.<br /> <br /> Par ailleurs, le commissaire européen a rencontré le ministre de<br /> l'agriculture français, Bruno Le Maire, qui lui a signifié l'opposition<br /> de son gouvernement à la proposition de la Commission.<br /> <br /> Les tentatives de la Commission européenne de débloquer le processus<br /> d'autorisation des OGM semblent avoir eu pour effet de ranimer<br /> l'opposition aux OGM. Une pétition a été lancée par Greenpeace et le<br /> réseau Internet Avaaz.org dans le but de réunir un million de<br /> signatures en faveur d'un moratoire sur les OGM en Europe, ce qui<br /> obligerait la Commission, selon un article du traité de Lisbonne, à<br /> lancer une initiative législative sur le sujet. Les associations<br /> affirment avoir déjà réuni 869 000 signatures.<br /> Hervé Kempf<br /> Article paru dans l'édition du 21.09.10.
M
JCH a écrit "Préserver une part, nécessaire entre autres à la production alimentaire, des terrains agricoles, cela ..." Ce n'est pas n'importe quelle part, mais les sols qui présentent le meilleur patrimoine agricole et non pas faire des sols une marchandise comme une autre.<br /> Les sols ne sont pas tous égaux, ni même équivalents sur le plan agricole, et les meilleurs sols agricoles doivent être réservés à la ville et non pas à l'aéroport de Roissy comme je l'ai vu faire, malgré moi. D'autres, pionniers de la pédologie en France, s'étaient déjà insurgés sur la construction du CEA sur le plateau de Saclay, sur des sols profonds et offrant beaucoup d'avantage à l'Agriculture. Déplacés de quelques centaines de mètres, il aurait été sur des sols peu épais, caillouteux peu favorables aux cultures. <br /> C'est dans cet esprit que j'ai trouvé intéressant d'illustrer la non-application du principe de précaution par l'utilisation sans études préalables de sols à forte valeur patrimoniale agricole sur le long terme, pour des raisons mercantiles ou d'implantations industrielles forcément à court terme, au gré d'alea économiques, financiers, spéculatifs de plus en plus instables (déjà en 1929 ?).<br /> Donc, il s'agit de choix raisonné des sols à urbaniser de préférence et non d'expension en pseudopodes à partir d'un centre ville tout puissant parce que "riches financièrement", mais ignare ou méprisant la richesse intrinsèque de chaque sol.<br /> -----------<br /> Sur le plan de l'Europe, elle a bon dos de la part des politiques nationaux qui se défaussent.<br /> <br /> ----------<br /> Des agriculteurs sont à soutenir, certains n'en ont pas besoin. Il faudrait simplement qu'ils soient tous payés en fonction de la valeur réelle de leurs produits, sur le plan qualitatif.
M
je vous signale ces réflexions de Maurice Tubiana sur le PP,intitulées Quo Vadis . . .<br /> <br /> http://www.marcel-kuntz-ogm.fr/article-principe-de-precaution-49533878.html
J
On connaît certainement mieux le travail des pédiatres, voire des podologues que celui des pédologues!<br /> Il semble que notre discussion parte dans deux directions, celle de l'éventuel conflit entre l'urbanisation et la protection des terres agricoles et celle de l'idée même de principe de précaution sur laquelle les avis échangés jusqu'à présent ne permettent guère de distinguer si l'opinion générale des blogueurs des sociétés modernes serait plutôt "précautionniste" ou plutôt "précautionnosceptique"!<br /> Sur ce premier point, je ne vois pas dans les remarques d'Isambert une méfiance à l'égard du développement urbain, mais bien plutôt une invitation à prendre en compte la typologie des sols disponibles dans les projets d'urbanisme. Préserver une part, nécessaire entre autres à la production alimentaire, des terrains agricoles, cela rejoint la tendance actuelle à préférer la densification des zones d'habitation existantes à l'extension en étoile coûteuse en matière de réseaux, de transports... Et puis, s'il faut un jour prochain tirer parti de la biomasse pour alimenter des chaufferies à partir de productions proches des lieux d'utilisation, autant ne pas gâcher, en les bétonnant, des zones agricoles périurbaines.<br /> Quant au principe de précaution, on peut certes s'en gausser assez drôlement comme le font M&J. De là à dire que nous sommes une nation de vieillards et de pleutres... D'abord, je ne vois pas trop si nous le serions plus que nos voisins qui, par parenthèse, font moins d'enfants que "nous", ce qui semble plutôt signe de confiance en l'avenir que de frilosité. Ensuite, il me semble que le développement actuel de la géothermie, du solaire, de l'éolien illustre que le fait de prendre en compte le caractère fini des quantités de ressources énergétiques fossiles incite plutôt à l'ouverture à la nouveauté et à la recherche. Et je ne parle pas de la perspective d'un jour en savoir plus sur les possibilités de la fission nucléaire! <br /> De beaux esprits, naguère, ont bien pu mettre en garde leurs contemporains contre les dangers supposés des voyages en chemin de fer et paraître, du coup, ridicules à nos yeux. Et sans doute que telle ou telle de nos préventions actuelles paraîtra demain infondée. Peut-être aussi que ce sera un peu tard qu'on mesurera, après ceux de l'amiante, les dangers de l'utilisation des téléphones portables... <br /> Mais je ne vois pas en quoi le principe de précaution serait nécessairement en contradiction avec les exigences de la recherche. Isambert a travaillé à l'INRA: visiblement, il a donc pu être à la fois chercheur et attaché au principe de précaution!
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