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vive les sociétés modernes - abécédaire
13 décembre 2008

L comme Laïcité (pilier de la modernité?)

L'objectif de la laïcité c’est l’indépendance à l’égard de la tutelle de la religion. C’est la fin de ses privilèges, sans ostracisme à son encontre. Ses valeurs et ses prescriptions ne sont sacrées que pour ceux qui le veulent. La laïcité transforme la tolérance en loi. Ni la politique, ni la science, ni l’art, ni le sport, ni la publicité, ni la presse, ni la culture, ni la morale collective, ni les moeurs, ni l’éducation publique, ni la santé n’ont de comptes à rendre à une religion. La liberté de conscience donne à chacun le droit de croire ou de ne pas croire à ce qu’il veut et d’agir en conséquence. La limite, c’est la loi. Si la loi autorise l’IVG, sous conditions, elle seule a force de loi. Si elle permet la culture des OGM, sous conditions, elle seule a force de loi.

La société moderne n’a pas d’origine plus assurée et de règle plus fondamentale. Quand un pays accorde un privilège quel qu’il soit à la religion, il a beau être un pays de liberté, de droit et d’économie de marché, il manque quelque chose pour être complètement à la hauteur du principe selon lequel les hommes naissent libres. Je pense aux États-Unis et à l’État d’Israël, à l'évidence loin d'être parfaits sur ce point, puisqu’on jure sur la Bible dans l’un, et qu’on ne se marie que religieusement dans l’autre.

La tutelle imposée d’une religion, ou le privilège de la religion en général sont indéfendables dans leur principe.

Il ne suffit pas toutefois pour que l’affaire soit réglée d’affirmer cette séparation, car on entre alors dans l’interprétation de ce mot.

Version dure : ceux qui le veulent croient à ce qu’ils veulent mais à condition de rester dans la sphère privée, de ne pas intervenir dans la sphère publique qui doit être idéologiquement neutre. La religion n’a rien à faire dans l’École, où seule est admise la raison, qui est a-religieuse. Dehors même les signes d’appartenance religieuse : l’espace est neutre et les élèves doivent être en accord avec cette neutralité.

« Quelle neutralité ? » demandent certains croyants aux athées.

« La raison n’est-elle pas neutre, n’est-elle pas notre bien commun ? » répondent les athées.

Il reste que sur certains thèmes, la parole est réservée au seul point de vue a-religieux. Or la croyance religieuse ne porte pas que sur l’au-delà. Elle a des choses qu’elle a envie de dire publiquement sur l’avortement, le divorce, l’euthanasie, la sexualité, les cellules souches, sans oublier la Création, sans oublier la foi !

D’où la version soft, qualifiée parfois de laïcité ouverte. La neutralité de l’État et de l’espace public en est l’idée maîtresse, pas la séparation. De ce point de vue, les religions ont le droit de s’exprimer et de se manifester dans l’espace public. Par exemple, un parti politique démocrate-chrétien ou démocrate-musulman sera jugé aussi constitutionnellement admissible qu’un parti se réclamant de l’écologie ou d’une idéologie visant à renverser la société par la violence révolutionnaire.

La laïcité entendue comme espace neutre ouvert à la pluralité des points de vue comporte beaucoup plus de problèmes et même de risques de crise que la séparation étanche. Mais elle est plus respectueuse de la liberté d’expression et de son propre principe premier : l’indépendance sans privilège ni ostracisme de toutes les formes de pensée.

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André Senik

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PS: pour collaborer à cet abécadaire:   pierre.gautier75@wanadoo.fr

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Commentaires
A
Les illustrations de ton blog sont belles
J
Merci à R Loffreda d'être revenu sur certains des temps forts de l'histoire de la laïcité. C'est vrai que la notion était peu contextualisée dans les commentaires à partir du texte de Sénik. Mais c'est vrai aussi que depuis l'occasion offerte par le centenaire de la loi de 1905 (d'où le terme de laïcité est en effet absent)les exposés historiques ont été assez frèquents. L'intérêt de l'éclairage historique est réel: il rappelle en effet que la loi fut une loi d'apaisement, que les sensibilités étaient diverses (et Combes n'était pas le plus farouchement anticlérical!)et que le champ d'application de la loi fut limité (Statut particulier de l'Alsace-Moselle et des territoires colonisés... pour des raisons qui tiennent plus à des considérations politiques).<br /> Mais l'éclairage historique peut avoir le défaut de trop lier la question de la laïcité à l'histoire contingente d'un pays particulier, de trop placer la laïcité comme enjeu d'une lutte d'influence entre un catholicisme dominant et un républicanisme en construction. Or, il ne s'agit plus de bouffer du curé ou de se méfier du pape (encore que...). Il s'agit de savoir si la paix civile, la liberté de pensée et d'expression, l'autonomie du sujet émancipé des tutelles communautaires, l'existence dans le cadre de l'état démocratique d'églises libres, si le droit de croire comme de ne pas croire, de se reconnaître dans une une religion comme d'en changer, si tout cela ne suppose pas essentiellement la réaffirmation résolue, aujourd'hui, du principe de laïcité comme "pilier de la modernité".
Y
Raphaël Loffreda a sans doute craint d'être trop long en articulant, malgré le hiatus qui a duré du concordat de 1801 à la fin du second empire, la première bouffée de laïcisme dur de la Révolution de 1789, et la montée en puissance du même laïcisme offensif au sein de la gauche républicaine de la IIIème République.<br /> <br /> Si la IIIème République n'a pas eu besoin de prendre les armes contre l'Église, c'est que, de leur côté, les catholiques n'étaient plus en mesure de les prendre. Mais les protestations et les refus de la Papauté n'avaient rien de surprenant. La politique anti-cléricale concernait des hommes et non des moutons.<br /> Ce sont les mesures d'apaisement prises par des hommes politiques raisonnables qui ont évité de possibles affrontements.<br /> <br /> Quelle église ou quel gouvernement ne préférerait pas le gouvernement des moutons plutôt que celui des hommes! Les textes fondateurs utilisent largement l'image symbolique du mouton et de son berger. Les brebis égarées sont moins nombreuses, mais l'objet de plus d'attention. La sottise et la soumission de l'espèce en ont fait la victime sacrificielle par excellence ( l'existence des moutons a-t-elle permis à notre civilisation d'abandonner les sacrifices humains?).<br /> <br /> Mais l'image des moutons suivant bêtement leur bélier dominant stigmatise la passivité que peuvent adopter les sociétés humaines. La prise de conscience de cette faiblesse n'est sans doute pas pour rien dans l'élaboration des idées de libération, d'autonomie de la pensée. En même temps, pour les mêmes, l'esprit moutonnier est encore souvent bien utile! Pire encore, les hommes, considérés en groupe, sont toujours des moutons pour les autres.
R
Ce billet, comme le suivant d’ailleurs sur le patrimoine culturel religieux, est fort intéressant. Toutefois, il ne me semble pas avoir vu la moindre trace de présentation historique dans ses lignes comme dans aucune de celles des nombreux commentaires, l’’intérêt se portant clairement sur d’autres éléments. Néanmoins il me semble que sur ce thème en particulier un bref rappel historique de la séparation des Églises et de l’État permettrait d’approfondir la réflexion posée par André Sénik, notamment en ce qui concerne les deux visions de la laïcité qu’il pose : versions dure et soft. Arrivant après la « bataille », je me permettrais une certaine longueur et précision dans ce commentaire, ne perturbant ainsi aucunement une discussion déjà terminée. Deux aspects me semblent ici fort à propos : le contexte immédiat de la création/promulgation/application de la loi de 1905* ; le contexte plus large qui est celui du rapport des républicains vis-à-vis de l’Eglise dans la seconde moitié du XIXe siècle, de la naissance de la République, ou plutôt d’une certaine République, qui s’inscrit dans une culture ambiguë vis-à-vis du sacré**.<br /> <br /> 1. Une loi fortement marquée par son contexte d’élaboration<br /> <br /> Le contexte est ici d’importance puisqu’il a fortement pesé sur la définition finale d’une laïcité assez radicale, que beaucoup d’entre-nous ont du mal aujourd’hui à séparer de l’idée de République, voire de démocratie. Pourtant, le simple fait que les Français de l’Est rattachés à la France en 1918 aient pu conserver le système concordataire napoléonien de 1801 montre bien que la réalité est plus complexe.<br /> <br /> Depuis les années 1880, les catholiques ont été assimilés par les Républicains à des opposants à la République. L’Affaire Dreyfus a exacerbé cette idée (correspondant alors largement à la réalité), et ce malgré le Ralliement de la droite catholique à la République en 1890 (toast du cardinal Lavigerie à Alger), confirmé par le pape Léon XIII en 1891 (encyclique Rerum Novarum). C’est l’immédiat contexte de l’Affaire Dreyfus précisément qui pousse les Républicains à régler le problème religieux latent depuis les débuts du régime. Trois hommes de premier plan vont se succéder dans cette tâche et orienter chacun des politiques plus ou moins radicales.<br /> <br /> Waldeck-Rousseau, un républicain modéré (« mais pas modérément républicain » selon ses propres mots) veut accentuer le contrôle de l’État sur les congrégations religieuses. En 1901 il fait passer la célèbre loi sur la liberté d’association, qui oblige les congrégations, contrairement à toutes les autres formes d’association, d’obtenir une autorisation du Parlement. Le pape Léon XIII du fait des promesses de Waldeck-Rousseau d’appliquer la loi avec tolérance, et d’une certaine ouverture à la modernité, accepte le fait accompli et autorise les catholiques à se rallier à la légalité républicaine. Voilà pour le principe, mais les élections législatives de 1902 bouleversent le paysage politique et Waldeck-Rousseau démissionne face à un bloc radical qui prône l’intransigeance vis-à-vis de l’Eglise.<br /> <br /> Emile Combes lui succède à la présidence du Conseil (juin 1902-janvier 1905) et applique avec le maximum de rigueur, à l’encontre même de son esprit premier, la loi de 1901 en refusant à toutes les congrégations l’accord sollicité. De loi de contrôle, il en fait une loi d’exclusion (S. Berstein). En 1904, il interdit par ailleurs, ce qui est alors cohérent, aux congrégations de fait non autorisées, de tenir des écoles. Le « combisme » mène aussi une politique anticléricale sur d’autres fronts, par le biais d’une épuration des cadres administratifs et en favorisant les carrières des juges et officiers clairement anticléricaux. Cette politique anticléricale intransigeante conduit à la rupture des relations diplomatiques avec le Vatican (1903-1904) dont le nouveau pape Pie X a une position bien plus réactionnaire que son prédécesseur. Or le concordat de 1801 nécessitait un accord entre le gouvernement français et la papauté pour la désignation des évêques. C’est cela qui pousse les Républicains à élaborer une loi de séparation de l’État et des Églises. De fait, de nombreux députés radicaux n’avaient pas ce point dans leur programme et ne la souhaitaient pas pour ainsi dire. Emile Combes aurait bien préféré en rester au régime concordataire, qui permettait à l’État de contrôler de l’intérieur l’institution religieuse ! Aussi voyons-nous toute l’importance du contexte.<br /> <br /> Le projet de loi déposé en novembre 1904 n’est voté qu’en 1905. Son rapporteur, le socialiste indépendant Aristide Briand en a finalement fait une loi d’apaisement contrairement au projet premier de Combes (libre exercice des cultes, biens ecclésiastiques, dont les monuments, transférés aux associations cultuelles gratuitement et à perpétuité, « retraite » payée par l’État pour les prêtres en fonction de leur ancienneté de service en 1905). Il est toutefois à noter que le terme même de « laïcité » n’apparaît pas dans le texte de la loi, car jugé trop neutre et pas assez virulent à l’époque. Mais c’est un échec, car Pie X la rejette catégoriquement, et derrière lui les catholiques français : aucune association cultuelle n’est donc créée. Pendant toute l’année 1906 on assiste à une quasi guerre civile (1 mort) autour de la question des inventaires : comme les catholiques refusent la loi, leurs biens doivent être saisis et pour cela inventoriés, avec intervention de la police et de l’armée face à la résistance des fidèles. Clemenceau met fin aux inventaires en octobre 1906, mais la question n’est pas réglée pour autant. C’est uniquement sous la présidence du Conseil de Briand en 1909-1911 qu’un apaisement intervient, marquant la fin de la « guerre religieuse » (qui durait depuis 30 ans). Les catholiques se voient reconnaître le droit de réunion (c’est donc la fin du « délit de messe ») et la jouissance des églises. La droite catholique, jusqu’à l’Union sacrée de la Première Guerre mondiale et surtout sa participation à la Résistance dans la Seconde, reste cependant aux yeux des Républicains historiques (et donc de gauche) suspecte.<br /> <br /> 2. La progressive maturation d’une laïcité républicaine (milieu XIXe-1905)<br /> <br /> Mais si les divers Républicains au lendemain de 1905 s’affirment laïcs depuis « toujours », comme le proclame René Viviani (discours devant l’Assemblée affiché dans toutes les communes : « Tous ensemble, par nos pères, par nos aînés, par nous-mêmes, nous nous sommes attachés dans le passé à une œuvre d’irréligion »), la réalité est toute autre. Presque au contraire, la religion a joué un rôle important dans l’élaboration d’une conscience laïque chez les Républicains. Paradoxal ? En partie seulement…<br /> <br /> A la suite de Georges Weill (1929), Philippe Boutry distingue quatre sources majeures au laïcisme de la gauche républicaine de la Belle Époque ; je suis ici sa réflexion. Trois des quatre ont directement à voir avec la religion ou l’idée de Dieu. C’est que le discours athéiste de la gauche est resté jusqu’à la fin du siècle minoritaire.<br /> <br /> - Le gallicanisme qui depuis la fin du Moyen Âge est une constante de la politique religieuse française, face à la papauté (qualifiée d’ultramontanisme), pensé comme signe d’une indépendance nationale a été repris par les républicains. Il s’agit d’affirmer que c’est bien l’Église qui est dans l’État et aucunement l’inverse, manière de revendiquer les droits de la Nation face à ce qui est perçu comme une ingérence romaine, étrangère (rappelons le contexte de nationalismes exacerbés participant à ces inventions nationales). Dans cette perspective, les républicains construisent leur argumentaire dans une certaine continuité de la pensée chrétienne, voire de l’histoire royale. Ainsi lorsque Michelet, ou surtout Clemenceau qui était athée, glorifient le glorieux passé d’une France « première fille de l’Église » et donc phare de la civilisation (« La France, soldat de Dieu jadis, aujourd’hui soldat de l’humanité, sera toujours le soldat de l’idéal », Clemenceau), il y a une certaine contradiction avec la culture politique républicaine de la fin du siècle (voir le dernier point du commentaire).<br /> <br /> - Le protestantisme a été complètement repensé et interprété par les Républicains comme une longue histoire de la liberté (non sans téléologie d’ailleurs), particulièrement par Quinet et Michelet. Ainsi le primat de l’Écriture a été pensé comme une œuvre d’instruction et d’alphabétisation ; le rejet de la Tradition qui lui est directement lié comme une libération de l’Esprit ; le libre examen comme la manifestation d’une liberté des consciences face au dogme et le sacerdoce universel comme un accroissement de la citoyenneté en parallèle avec l’extension du suffrage. Ceci n’est pas pour rien dans le fait que le personnel ministériel des années 1880-1890 a été largement composé de protestants. Ce sont d’ailleurs des protestants qui se sont vus confié le soin d’imposer une morale laïque à l’école dans les années 1880 (comme Ferdinand Buisson).<br /> <br /> - Les libres-penseurs et les spiritualistes ont également joué un rôle essentiel. Comme le dit Marcel Gauchet (cité par P. Boutry), ils ont constitué « la religion de la sortie de la religion ». Ce courant important de la vie politique républicaine se fondait sur la croyance d’une divinité « philosophique », forme de « religion naturelle » à l’opposé du dogmatisme des religions constituées (et du catholicisme en particulier). Combes lui-même écrit ceci dans ses mémoires : « J’ai été toute ma vie un spiritualiste fervent, qui a essayé sans succès de plier son intelligence à la dogmatique de l’Église catholique. » Sans connaître le sujet outre mesure, cette posture me fait penser à nombre de chrétiens ou bouddhistes occidentaux actuels. Mais qu’on ne s’y trompe pas, la libre-pensée a été extrêmement anticléricale (cf Combes).<br /> <br /> - Le dernier courant qui a alimenté l’élaboration de la laïcité républicaine est à situer en dehors de la religion ou du déisme, puisqu’il s’agit précisément de l’athéisme et de l’anticléricalisme, fortement couplés au scientisme de l’époque, qui à partir des années 1860 a le vent en poupe chez les républicains (Ferry, Clemenceau, Gambetta, Zola…). La science en cette époque de positivisme est perçue comme un anti religion permettant de libérer entièrement la compréhension du monde de tout dogme. La suite du discours de Viviani déjà cité est très représentative de cette culture républicaine qui voyait dans l’Église et la religion un obscurantisme anti-Lumière, anti-Raison, dont il fallait se débarrasser pour permettre aux consciences d’être pleinement libres et citoyennes et libérer la « marche » du Progrès (cf les trois âges de l’humanité identifiés par Auguste Comte) : « Nous avons arraché les consciences humaines à la croyance. Lorsqu’un misérable, fatigué du poids du jour, ployait les genoux, nous l’avons relevé, nous lui avons dit que derrière les nuages il n’y avait que des chimères. Ensemble et d’un geste magnifique, nous avons éteint dans le ciel des lumières qu’on ne rallumera plus. » La science (Darwin, Bernard…) n’est pas la seule à alimenter le courant athée et anticlérical : le socialisme (Blanqui : « Ni Dieu ni Maître » ; Marx est son « opium du Peuple »), l’anarchisme également, mais aussi la Franc-maçonnerie qui, très influencée par la Libre-Pensée, se dégage à la fin des années 1870 de sa gangue religieuse (du moins pour le courant majoritaire). Notons au passage que c’est dans les années 1860 que les néologismes « cléricalisme » et « anticléricalisme » sont inventés. Ce courant irréligieux a dès son accession au pouvoir mené une politique anticléricale dont je rappelle les principales dates qui sont les prémisses de la loi de 1905 : 1880 et la fin du repos dominical obligatoire (c’est Constantin, le premier empereur romain chrétien, qui pour favoriser le christianisme avait dans les années 320 imposé le dimanche comme jour férié) ; 1882 et l’école primaire laïque ; 1884 et la fin des prières publiques dans les assemblées ainsi surtout que le rétablissement du divorce par la loi Naquet ; 1889 et la fin des exemptions du service militaire pour les séminaristes (« curés sac au dos »).<br /> <br /> Je conclurais par la posture très paradoxale de cette République qui considère pour son peuple que la religion est un facteur d’obscurantisme, tandis qu’elle estime que l’évangélisation des indigènes qu’elle colonise dans le même temps est signe de civilisation. Est-ce à dire que la « bonne » religion (au sens occidental) est une étape obligatoire du processus de civilisation ? que la France estime que tous les peuples inférieurs (en 1885 la Chambre des députés reconnaît par vote la théorie de la hiérarchisation des races) doivent passer par les mêmes étapes qu’elle pour atteindre un jour leur maturité ?<br /> <br /> Raphaël Loffreda<br /> <br /> Notes :<br /> * Je m’appuie sur ce point sur des ouvrages classiques et généraux de l’Histoire de France. En l’occurrence : F. Démier, « La France du XIXe siècle (1814-1914) » ; S. Berstein et P. Milza, « Histoire de la France au XXe siècle (1900-1930) » et le chapitre « Naissance des partis politiques modernes » de S. Berstein dans « L’invention de la démocratie (1789-1914) », sous la direction du même et de M. Winock, Seuil, 2003, (plus précisément les pages sur « l’enjeu anticlérical » 456-460).<br /> ** Il s’agit essentiellement d’une reprise très synthétique des grands points de l’excellent article de P. Boutry, « La gauche et la religion », in « Histoire des gauches en France. L’héritage du XIXe siècle (vol 1) » (s.d.d. J.-J. Becker et G. Candar), 2004, p.317-341. Ponctuellement voir pour la culture républicaine des débuts de la IIIe République le chapitre rédigé par Serge Berstein dans l’ouvrage précédemment cité : « La culture républicaine, une réponse adaptée aux aspirations de la société politique » (p.283-290), ainsi que celui consacré par Nicolas Roussellier au conflit scolaire : « La révolution scolaire » (p.349-353).
J
4 septembre 1904...<br /> Le président du Conseil Emile Combes dans un discours prononcé à Auxerre lance le mouvement qui mènera à la loi de 1905.<br /> Le Cercle Condorcet d'Auxerre et la ligue de l'enseignement de l'Yonne organisent des entretiens pluridisciplinaires. En 2004, avec l'aide du Groupe de Sociologie des Religions et de la Laïcité, les entretiens ont porté sur la séparation des Eglises et de l'Etat et sur l'avenir de la Laïcité. <br /> Les contributions (elles émanent de spécialistes français, allemands, ukrainiens, italiens, japonais, canadiens, mexicains et turcs...)sont publiées (Ed de l'Aube, Diffusion Seuil) assorties d'une introduction de Michel Wieworka et d'une conclusion de Jean Baubérot.<br /> Apparemment, dans l'Yonne, on ne fait pas non plus de ces questions une affaire exclusivement franco-française...
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  • Cet abécédaire est élaboré progressivement. Les contributions proviennent d'horizons (professionnels, disciplinaires, philosophiques...) divers. Il voudrait être un témoignage sur notre époque.
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